La mémoire de travail (MDT) et la réussite scolaire

« Hein qu’est-ce qu’il faut faire, qu’est-ce que le professeur a dit ? J’ai oublié la page. Quand je prends note je suis stressée, j’ai peur de ne pas tout écrire. J’oublie souvent une partie de l’énoncé ! Etc. »
On peut considérer la mémoire de travail (MDT) comme un outil de base pour les apprentissages, un carrefour incontournable. Elle est multiple. Le temps d’exécuter une tâche,
– elle maintient des informations perçues visuellement, auditivement, sensitivement (odorat, goût, toucher), le temps de l’exécution de la tâche,
– elle va rechercher des connaissances acquises et les procédures qui y sont reliées,
– elle intervient dans l’apprentissage des matières scolaires (lecture, mathématiques, prise de notes, etc.)
« Une augmentation des performances de mémoire de travail est observée jusqu’à environ 15 ans. … Sachant que le cerveau connaît une maturation progressive tout au long des 20 premières années de vie.» , Nous allons nous intéresser surtout aux informations entendues, vues et lues. Toute la journée, les élèves sont amenés à devoir retenir des données vues, lues ou écoutées pour exécuter les tâches scolaires. L’enseignement frontal s’appuie fort sur la MDT, sans en avoir conscience : je note ce que j’écoute, je retiens une partie de l’énoncé (mots, phrases, images, etc.) pour réfléchir, pour répondre à une question, etc.
Cette composante de nos ressources cognitives est en lien direct avec la réussite scolaire, une faiblesse de ce côté-là, et l’élève se trouve en difficulté pour prendre note, répondre à des questions, faire du calcul mental, etc., sans compter que la MDT soutient la concentration, et inversement. C’est un aspect des compétences cognitives aussi important pour un apprenant qu’indépendant du contenu des cours. Il s’agit d’une variable indépendante, personne n’est en faute s’il est victime de faiblesses de sa mémoire de travail.
Une analyse (voir le graphique ci-dessous) des résultats obtenus aux trois subtests de la Wisc-V qui évaluent la mémoire de travail verbale et visuelle d’une petite population d’élèves de 12 à 16 ans fréquentant l’enseignement général qui a consulté le Centre de Réussite Scolaire pendant l’année scolaire 17-18 nous permet les hypothèses suivantes : les différences de performance interindividuelles, et entre les résultats pour un même élève s’avèrent très importantes, ceci confirme les études existantes.
Une analyse équivalente faite en 2007 à partir de la Wisc-IV, allait dans le même sens. Comme vous le constatez grâce aux profils de la MDT de 16 élèves pris au hasard de la population qui nous consulte et suit un cursus classique, il y a grande variabilité des performances, elle justifie une évaluation plus poussée de la mémoire de travail, elle apporte une belle source d’informations pour comprendre les difficultés d’apprentissage d’un élève. Le surlignement horizontal gris marque l’ensemble des résultats considérés dans la moyenne, 8 = moyenne inférieure, 12 = moyenne supérieure.
Les résultats au-dessus relèvent du niveau supérieur à la moyenne, les résultats en dessous de 8 relèvent du niveau inférieur à la moyenne. La grande variabilité des performances, justifie une évaluation plus poussée de la mémoire de travail, elle apporte une belle source d’informations pour comprendre les difficultés d’apprentissage d’un élève.
Réflexions et conséquences pédagogiques d’une MDT peu efficace :
Comment un élève ayant de réelles difficultés à garder temporairement les informations nécessaires à résoudre une tâche scolaire va-t-il pouvoir maintenir son attention efficacement ? Il s’épuisera plus vite pendant les cours, la matinée, la journée, le trimestre, etc. Au retour de l’école quelle énergie lui reste-t-il pour les devoirs et les leçons ? Comment peut-il lors des examens exploiter au mieux ses acquis ? Etc.
Notre système scolaire n’intègre pas, ni dans sa didactique ni dans son évaluation, de telles faiblesses cognitives, l’élève suit ou tant pis pour lui.
– Plus de 40% de notre population ont des raisons de se « plaindre » de leur mémoire de travail. Ils ne sont pas responsables des causes de ce problème, et ils les assument de toute façon !
L’autoévaluation est plus pénible, l’apprenant s’interroge oralement, répond correctement, mais oublie vite les réponses dites, ce qui l’oblige à les écrire et ainsi allonger le temps de travail.
L’élève retient de façon incomplète ce qu’il vient de lire pour résoudre la tâche, certains élèves ne pouvant retenir qu’une partie de la consigne si celle-ci contient plus de deux instructions ou exige une manipulation mentale, ils demandent à leurs voisins de classe, au professeur de la répéter « Quoi, qu’est-ce qu’il a dit, qu’est-ce qu’il faut faire ? ».
– Les fins de journées, les périodes de blocus, d’examens sont plus difficiles à gérer, notamment à cause du grand surplus d’efforts nécessaire pour compenser le déficit et donc la fatigue qui en découle.
Les conséquences de problème au niveau de la mémoire de travail dépassent largement le cadre scolaire.
De toute façon, il faut s’assurer que l’élève n’a pas de problème visuel, ORL, nutritionnel, une difficulté à ces niveaux-là peut polluer la mémorisation comme le reste des efforts intellectuels. Un article prochain proposera des idées, des propositions aux élèves, leur entourage, aux professeurs pour compenser des faiblesses de la MDT. D’ici là, pensez-y aussi !
À suivre
L’équipe
Définition plus complète: Sur le plan pédagogique, nous définissons la mémoire de travail comme celle qui condense ce qui est nécessaire à la compréhension, l’application ou la mémorisation d’une leçon au moment où on l’étudie, d’une tâche intellectuelle au moment de son exécution. Cette mémoire est de ce fait étroitement liée au traitement de l’information. Elle dépend aussi de la qualité des différents types de mémoires, tout en étant liée plus ou moins étroitement à la coordination visuomotrice (je vois puis je fais) et à l’attention-concentration. Elle est un type de mémoire à court terme, un stockage temporaire. (Bronselaer D., 2010, Réussir à l’école, Averbode, Labor éducation).
Notons que la mémoire de travail est multiple. « Elle correspond à l’instance qui permet de maintenir disponibles les informations perçues et d’activer les connaissances et les procédures nécessaires à leurs traitements. Plus précisément, elle remplit notamment les fonctions suivantes (Rossi, 2005) : – sélectionner les informations qui doivent être traitées et les connaissances antérieures qu’il semble opportun d’activer ; – inhiber les traitements automatisés ; – réguler le flux attentionnel et maintenir disponibles les informations et/ou connaissances pertinentes et, au contraire, inhiber celles qui ne le sont pas ; – coordonner les opérations liées à la réalisation de différentes activités. » (in sous la direction de Crahay, M., et Dutrévis, M., 2016, 2è éditions, Psychologie des apprentissages scolaires, Ouvertures Psychologiques, de Boeck supérieur). Lee, Bull&Ho, 2013, in « La mémoire chez l’enfant : du développement aux apprentissages, de F. Dégeilh, F. Eustache, B. Guillery-Girard, in A.N.A.E., 2017 ; 149 ; 44-458 ».

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