La Belgique francophone devrait rester la pire faiseuse d’échecs en enseignement secondaire d’Europe (et pas que) si elle n’annule pas les redoublements cette année.


Avant les confinements, la Belgique francophone atteignait les plus hauts taux de redoublement d’Europe en 3è, 4è et 5è secondaire.
Avant les confinements notre enseignement secondaire connaissait un taux de décrochage scolaire ET d’absentéisme professoral des plus élevés.
Aujourd’hui, nous voyons des milliers d’élèves supplémentaires forcés de (re)doubler dans l’indifférence TOTALE des politiques, complètement incapables d’intervenir pour limiter ce massacre. Ces victimes ne votent pas.

Rappelons que depuis un an et demi nos adolescent.e.s ont soufferts :

  • d’un manque dramatique d’encadrement scolaire, dont l’enseignement hybride totalement inefficace,
  • d’un manque préjudiciable d’activités sociales,
  • d’un manque handicapant d’activités physiques,
  • d’un environnement familial, sociétal soumis à des tensions inattendues, traumatisantes,
  • et d’après les résultats de ce mois de juin,d’un nombre excessifd’enseignants qui ont surtout montré leur capacité de nuire, vu les milliers d’étudiants supplémentaires qu’ils ont mis en échecs.

Des dizaines de millions d’euros supplémentaires à ajouter aux centaines de millions déjà perdus  (un élève qui double peut rester un an de plus dans sa famille, travailler du coup un an de moins, plus les frais pour la communauté d’une année d’école supplémentaire : coût de 30 à 40 000 euros par doubleur, de court à long terme).

Sans compter que cela favorise :

  • la surpopulation des écoles,
  • le sous-investissement financier (cesdits millions sont perdus),
  • la difficulté pour les professeurs d’enseigner, et pour leurs élèves d’apprendre,
  • le nombre de décrochages scolaires et le taux d’absentéisme professoral,
  • la consultation chez les psychologues, les psychiatres qui en sont dépités et scandalisés,
  • etc.

Un serpent qui se mord la queue tout en ruinant la communauté.

Alors entendre un inspecteur de l’enseignement secondaire dire à un journaliste de la RTBF que des professeurs ont eu raison de faire doubler des majorités d’étudiants de groupes classes, tous victimes des effets néfastes des confinements, c’est à faire peur !

Notre expérience nous montre depuis 45 ans, que les professeurs, les écoles, les cultures scolaires qui écoutent et tiennent compte de la parole des élèves, même en maternelle, offrent un enseignement où les usagers (élèves, parents, enseignants, etc.) sont plus heureux, des élèves plus autonomes et qui réussissent au moins aussi bien leurs études supérieures que les étudiants « bien de chez nous ». Et ça coûte moins cher !

Annulons les redoublements et proposons aux élèves en difficulté, des travaux de vacances adaptés à leurs besoins ! C’est à nous les adultes de leur assurer une meilleure réussite scolaire, un meilleur bonheur d’apprendre. Je ne peux en tant que professionnel de la santé mentale que m’insurger devant une telle maltraitance de notre jeunesse.  Elle n’est pas responsable de la covid 19 et de ses conséquences.

Didier Bronselaer

Rappel: Recours au secours des élèves

Plus que jamais en juin 2021, chaque étudiant.e.s qui se verra menacé.e de réorientation sauvage ou de redoublement, devrait avec l’aide de sa famille ou d’Infor Jeunes (https://inforjeunes.be/), procéder à un recours interne dès la remise des résultats, même si l’école vous dit que « ça ne sert à rien » ! Cette procédure consiste généralement à rédiger une lettre à l’attention de la direction de l’école dans laquelle sont développés les arguments de l’élève. Dans certains établissements, l’élève et ses parents sont invités à rencontrer le chef d’établissement ou son délégué pour défendre leurs arguments (trop souvent c’est pour décourager la démarche, mais tenez bon !). L’école doit vous fournir les documents pour ce faire. 

Si le recours interne est refusé, procédez au recours externe : http://www.enseignement.be/index.php?page=26245&navi=2032  

Notre conseil vaut aussi pour les CEB « raté » : http://www.enseignement.be/index.php?page=24561

Le bonheur d’être à l’école, indépendamment des confinements

Lisez ou / et écoutez

Associe-t-on dans notre culture scolaire, la vie de l’élève avec la satisfaction, le bien-être qu’il éprouve à l’école, la plénitude qu’il ressent en pensant à sa vie d’élève ?

Le bonheur d’être à l’école, était (est) un thème peu traité, du moins jusqu’aux confinements. Associe-t-on dans notre culture scolaire, la vie de l’élève avec la satisfaction, le bien-être qu’il y éprouve, la plénitude qu’il ressent ? Très peu ! Pourtant comme l’a si bien écrit W.D. Winnicot (1995), l’école est le 2è foyer de l’enfant (voire le 3è pour les familles recomposées), alors pourquoi ne veille-t-on pas plus au bonheur d’être élève dans l’enseignement obligatoire ?

Du paradoxe comme explication :

Paradoxalement, le « trop de réussites » tue la réputation d’une école, d’un professeur. C’est trop facile ? C’est suspect ! Un professeur chez qui 9/10 des élèves réussissent n’est pas sérieux, qui plus est s’il enseigne les maths ou les sciences ou le flamand ! C’est normal que tant d’élèves échouent en math, c’est une matière difficile.

Quel retournement de situation ! NON, ce n’est pas normal qu’un cours imposé à des adolescents soit la source de nombreux échecs, avec leurs corolaires psychologiques (tristesses, souffrances, complexes), économiques (leçons particulières données souvent par ces mêmes enseignants qui sont à la source des échecs) et sociaux (l’option math est intellectuellement valorisée, et l’élève qui en échec se voit conseillé d’aller voir ailleurs. En techniques ?).

On qualifie d’élitiste un professeur, une école qui génère beaucoup d’échecs surtout les quatre premières années du secondaire. L’élève qui y affiche des difficultés récurrentes se voit conseiller vivement d’aller voir ailleurs.

L’échec nourrit l’élitisme, le trop de réussites s’associe au laxisme. Un paradoxe qui paralyse depuis longtemps l’évolution heureuse de notre système scolaire, car il ne respecte pas la règle élémentaire suivante :

La réussite d’un apprentissage génère le plaisir de l’apprendre, ce plaisir génère l’envie de continuer à l’apprendre ; cette logique constitue la source de la motivation.

Mais la mentalité des professionnels et des parents qui contribuent à la réputation d’une école élitiste pense que l’échec, la dureté de la pédagogie constitue un apprentissage, une source de motivation en soi « apprendre à travailler se voit lié à la souffrance ». Souffrir préparerait le jeune à la réalité de l’avenir, mais pas au bonheur d’apprendre !?

Pourquoi en fin de journée, après les cours, l’école n’offre-t-elle pas des espaces de vie, comme des ateliers d’art (il y en a 7), du sport, un lieu de remédiation géré professionnellement ?

Bien sûr, certaines écoles proposent des activités, mais c’est rare, et puis pas du tout institutionnellement inscrit. Les Écoles de devoirs dès leur création dans les années 70 ont été envisagées hors de l’école. Un contresens !

Le bonheur à l’école, une question de philosophie
Où ce mot est-il inscrit dans les objectifs des programmes, dans la politique scolaire ? La motivation heureuse se base sur le plaisir éprouvé, qui lui-même nait de la réussite récurrente rencontrée au cours des apprentissages. C’est une loi humaine. Si une personne dans l’exécution d’une tâche, dans un travail éprouve de façon répétée plus de déplaisir que de plaisir, il y a blocage, tristesse, sentiment d’échec. C’est une règle psychologique. La dureté de la pédagogie, la stigmatisation de l’élève qui échoue vont donc à l’encontre de la réussite scolaire et favorisent le blocage psychologique. Ce type de blocage est à la source de nombreux décrochages scolaires, et absentéismes professoraux.
Si on veut des élèves plus heureux dans leur vie scolaire, la pédagogie collaborative doit constituer un but en soi, elle favorisera un réel changement philosophique de notre enseignement obligatoire parce qu’elle s’élabore à partir des ressources cognitives, physiologiques de l’enfant, de son bonheur de vivre, de son bonheur d’apprendre. Ce bonheur est contagieux.

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