La maturité et la non-réussite scolaire, un lien trop souvent établi aux dépens de l’apprenant

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M(at)ure ou pas m(at)ure ? Se demande l’adulte au sujet d’une plante. De toute façon, il n’essaiera pas d’amener cette plante « en retard de développement » à recommencer sa saison !

Amener un élève à refaire une année scolaire parce qu’on le trouve immature revient surtout à retarder son épanouissement global, à le punir pour une chose qui ne dépend ni de sa volonté, ni de celle de ses enseignants, mais qui est liée à son développement neurobiologique. Globalement, les filles se voient quittes de leur fatigue de croissance deux ans avant les garçons, c’est comme ça ! Cette différence de maturité n’est absolument PAS respectée par les exigences scolaires, la didactique des professeurs, les contenus des programmes, les évaluations sommatives, etc.

DÉMONSTRATION

Maturité, ou plutôt maturation

La maturité est l’état de ce qui a atteint son développement complet, qui est mûr. Que de fois un enfant se voit proposer de doubler pour cause d’immaturité, un non-sens, puisqu’il est en cours de développement, en pleine maturation, par définition. Pour le coup, c’est le pénaliser pour une mauvaise cause indépendante de ses efforts, de son travail, de sa volonté. Voilà une belle injustice ! La maturation psychique dépend aussi de celle du cerveau, du corps, également de l’histoire de vie de la personne ; l’adolescence est plutôt liée au psychique, et la puberté au biologique, l’un et l’autre s’influençant. Le terme post-adolescence peut être associé au passage de l’adolescence à l’adulte. Pourrait-on dire que la personne arrive alors à maturité (psychique) ? Sans doute, et souvent, dans notre société, après 20 ans.

L’évaluation diagnostique pluridisciplinaire des apprentissages de centaines et centaines de patients de la maternelle au supérieur nous a appris une chose : les élèves sont plus souvent dysharmoniques dans leur développement cognitif qu’harmoniques, et ce indépendamment de l’enseignement bien sûr. Plus le jeune se verra respecté et positivé dans sa vie d’élève, meilleure sera la qualité de sa maturation. Faire doubler une personne pour cause d’immaturité, non seulement ne l’aidera pas dans sa maturation (processus neurobiologique), mais cela affectera négativement son développement psychoaffectif (processus psychique). Les thérapeutes professionnels le savent bien. Une fois de plus la pédagogie collaborative se voit justifiée, tant elle veille à respecter la maturation de chacun, dont la dysharmonie fréquente entre le développement physique et cognitif chez les adolescents.

Voici deux problèmes de maturation aussi fréquents que peu connus :

Un profil d’apprentissage dysharmonique

Il existe souvent de grandes différences cognitives entre les élèves, comme d’ailleurs entre les aptitudes d’une même personne. Cette fluctuation des performances peut se qualifier de dysharmonie[1] cognitivo-intellectuelle. Elle caractérise plus le fonctionnement de la pensée humaine que l’harmonie. Les écarts sont parfois tels qu’ils provoquent des oscillations importantes dans les résultats des productions des élèves ; ils fragilisent alors la pensée. Ainsi une personne peut offrir de réelles forces verbales associées à des faiblesses non verbales (raisonnement spatial, mémoire visuo-spatiale, etc.) pénalisantes.

Exemple : Comme le professeur explique une notion mathématique en la dessinant, le jeune a le sentiment de bien la comprendre (il s’appuie sur ses forces verbales), mais seul chez lui il se sent perdu quand il doit résoudre un exercice basé sur le raisonnement spatial, sa faiblesse.

La dyssynchronie

Concept développé par le psychologue français Jean-Charles Terrassier pour décrire le vécu psychosocial de l’enfant intellectuellement précoce ou surdoué (1981). Il y a la

  • dyssynchronie interne, caractérisée par des disparités de développement au sein même d’un élève, par exemple un apprenant a un corps de 11 ans et une capacité de raisonnement tant verbale que spatiale d’un adolescent de 14 ans ; une différence bien difficile à gérer sur le plan psychologique,
  • dyssynchronie sociale caractérisée par une inadaptation des réactions, des réponses de l’environnement (parents, camarades, école, etc.) aux besoins ou attentes dudit enfant.

Exemple : Voyant un élève en classe se plaindre de ne pas comprendre une notion, il propose son aide et se voit mal reçu « toi l’intello laisse-moi tranquille », ce même élève qui déjà fait un gros effort pour supporter les centres d’intérêt de ses condisciples qu’il trouve très ennuyeux.

Notons que le problème est similaire pour les enfants qui offrent un profil intellectuel globalement faible !

Comme pour tout autre problème de comportement, d’apprentissage, ce jeune doit bénéficier d’un examen diagnostique des apprentissages pluri et transdisciplinaire puis se voir aider en conséquence.

Remarque pédagogique

Une chose est sûre, la plupart des élèves qui se voient informés de leurs différences et des bonnes solutions pour y remédier, au moins en partie, se voient autrement et investissent les matières scolaires avec plus de sérénité. Si leurs enseignants sont mis au courant, dans le cadre du secret professionnel, ils sont renforcés dans leur rôle, puisqu’ils pourront mieux aider un élève en particulier, mais aussi renforcer leurs propres compétences.

Un élève informé sur ses caractéristiques d’apprentissage, sur son bon développement, se sentira respecté, compris dans ses difficultés à l’inverse de se voir (mal)traité d’immature.

Rappel

Les décisions prises pour lutter contre la Covid-19, continent à affecter les enfants et adolescents dans leur épanouissement et donc leur maturation notamment à cause des faits suivants qui se sont déroulés sur 3 années scolaires :

  • Le manque de jours d’enseignement généré par les confinements et quarantaines.
  • Le grand manque d’encadrement scolaire.
  • Le manque préjudiciable d’activités sociales.
  • Le manque handicapant d’activités physiques.
  • Un environnement familial, sociétal, qui fut soumis à des tensions inattendues, traumatisantes.
  • Parler « masqué » à un jeune élève ne fait que lui rendre la tâche encore plus difficile et donc plus énergivore.
  • Le port du masque par l’élève rend les journées d’école plus énergivore, l’attention se voit plus vite épuisée. Il en va de même pour les enseignants.
  • N’oublions pas que le port du masque « masque » l’expression de l’autre, ce qui peut déstabiliser la perception que le jeune a de l’autre, le sourire ne passe plus vraiment.
  • Trois années scolaires que l’élève voit son cadre scolaire se déstructurer dans le temps et l’espace, c’est éprouvant. Il ne faut pas sous-estimer la lassitude voire une régression que cela peut générer auprès des apprenants, surtout s’ils sont victimes de difficultés d’apprentissage.
  • Aujourd’hui, alors que les gestes barrières n’envahissent plus les classes, la déstructuration du rythme de travail des élèves perdure notamment à cause d’un absentéisme très élevé à la fois des enseignants et des élèves.

Il faut accepter que des pans du programme scolaire N’ONT PAS été enseignés, que donc des prérequis manquent chez les élèves dans presque tous les cours.

Didier Bronselaer


[1] Nous n’abordons pas ici la notion de dysharmonie cognitive ou de la pensée reprise en psychopathologie comme une altération grave des procédures de raisonnement.

Court article complémentaire (à lire) :

 Si vous avez d’autres sujets qui vous préoccupent et s’ils concernent les apprentissages, l’école, vous pourrez trouver des réponses (accès gratuit), en cliquant sur https://centredereussitescolaire.be/2020/02/24/plusde50-reponses-professionnelles-developpees-a-partir-des-questions-qui-nous-sont-posees-depuis-30-ans/

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Le Centre de Réussite Scolaire par sa grande indépendance, son type de consultation pluri et transdisciplinaire, et ses 36 ans d’expérience s’avère idéalement placé pour vous informer de ce qui favorise ou défavorise la réussite scolaire, le bonheur d’apprendre des élèves des plus petits aux plus grands.

La solitude nécessaire de l’apprenant, la comprendre et la favoriser

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Pour réellement comprendre, connaître à long terme un savoir, un savoir-faire, l’élève doit élaborer une relation personnelle avec le sujet de cet apprentissage.
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Pas de relation pensée, pas d’apprentissage personnel !

Face à un objet scolaire à maîtriser, le jeune s’appuie sur son expérience de la réussite de ce type d’apprentissage, mais aussi sur ses ressources cognitives, intellectuelles, physiques.

Il élabore une relation qui part de son « soi » et qui va vers l’extérieur ; il établit un sens « aller-retour ». S’il ne perçoit de sens, il ne peut s’approprier vraiment le sujet à maîtriser.

Une action solitaire qui nécessite un environnement positif pour se réaliser heureusement.

« Je suis seul quand je dois comprendre quelque chose, car je suis le ou la seul.e à pouvoir me l’approprier. »

« Est-ce que j’aime cette solitude, est-ce que j’y vis la réussite nécessaire pour l’investir, l’étendre, la conserver ? »

Ce sentiment de solitude se nourrit notamment des conditions d’apprentissage du moment, donc de l’encouragement, du respect, de la réussite qui l’accompagnent. Pensons au petit enfant qui apprend à marcher d’initiative et aux réactions de son environnement aux moments où il le montre.

Je pense que l’enfant naît (que nous naissons) avec un sentiment épistémique positif, une envie potentielle d’apprendre qui l’habitera (nous habitera) toute sa (notre) vie.

Quels sont les meilleurs moyens psychologiques et pédagogiques qui favorisent ce formidable sentiment solitaire, cette envie potentielle d’apprendre ?

  • Bien sûr, la réussite ! Puisque c’est elle qui engendre le plaisir et l’envie de continuer l’apprentissage en cours, racines de la motivation positive.
  • Se sentir valorisé par la réussite d’une action, d’un comportement (« aider », pratiquer un sport, un art, une activité heureuse, etc.) amène à s’épanouir, enrichir son estime de soi, à plus s’aimer, que du bon pour apprécier sa part solitaire.
  • Installer le bonheur dans son sens « sérénité » parmi les finalités de l’enseignement obligatoire. https://centredereussitescolaire.be/2021/06/17/le-bonheur-detre-a-lecole-independamment-des-confinements/
  • La métacognition consiste en un processus par lequel un élève prend conscience de ses facultés et activités cognitives. Elle lui apporte une dimension très riche et nécessaire, si nous sommes soucieux de le rendre plus autonome https://centredereussitescolaire.be/2018/12/12/comprendre-par-soi-meme-malgre-lenseignement-frontal-2/. Un des bénéfices de celle-ci est de promouvoir la connaissance de soi par l’intermédiaire de la connaissance de sa pensée, de sa façon de réfléchir, de sa façon d’étudier. Elle offre l’avantage d’aider l’élève à développer la perception de son efficacité en même temps que son efficacité « tout court ». Autonomie et solitude sont ici, synonymes. Que l’enfant soit plus ou moins autonome, il reste seul quand il doit s’approprier un apprentissage.
  • Le respect des ressources d’apprentissage de l’apprenant. https://centredereussitescolaire.be/2020/02/24/plusde50-reponses-professionnelles-developpees-a-partir-des-questions-qui-nous-sont-posees-depuis-30-ans/
  • Avant d’être réorienté ou de doubler, tout élève mérite une évaluation diagnostique des apprentissages, pluridisciplinaire. https://centredereussitescolaire.be/2020/01/23/lassommante-evaluation-sommative
  • Nous rencontrons régulièrement des étudiants qui vivent certains apprentissages comme les renvoyant systématiquement à un sentiment envahissant d’inefficacité, voire à une dénégation de soi, « Quoi que je fasse, j’ai des mauvais points, je suis un nul. » Un enfant qui se voit trop souvent mis en échec peut traduire cela en un fort sentiment d’être puni au point de l’intérioriser comme « C’est normal puisque c’est moi » et l’adulte souvent de surajouter « Si tu n’as pas de meilleurs points, c’est que tu ne le veux pas » ; ceci peut amener le jeune à étouffer l’expression de sa tristesse.
  • à l’élève en échec une approche globale professionnelle qui l’aide lui et sa famille à faire plus justement la part des choses. La guidance psychopédagogique qui en découle alors offre à ce jeune (et ses proches) l’occasion de mieux se connaître, de répondre de façon plus adaptée aux exigences scolaires, d’aider ses proches, voire de se réparer.
  • Etc.

Didier Bronselaer

Court article complémentaire (à lire) : PRÉVENIR le DÉCROCHAGE SCOLAIRE https://centredereussitescolaire.be/2019/04/28/prevenir-le-decrochage-scolaire/

 
Si
vous avez d’autres sujets qui vous préoccupent et s’ils concernent les apprentissages, l’école, vous pourrez trouver des réponses (accès gratuit), en cliquant sur https://centredereussitescolaire.be/2020/02/24/plusde50-reponses-professionnelles-developpees-a-partir-des-questions-qui-nous-sont-posees-depuis-30-ans/

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